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L’économie Yaya Keita prévient : « La stabilité monétaire repose autant sur la communication et la gestion psychologique que sur la politique économique proprement dite »

En Guinée, comme dans de nombreux pays à économie émergente, le système monétaire repose sur deux piliers : la politique économique conduite par la Banque Centrale et la confiance des agents économiques dans la valeur et la circulation de la monnaie. Or, ces dernières semaines, une tension persistante sur les liquidités dans les banques primaires remet au cœur du débat une vérité souvent négligée : la stabilité monétaire n’est pas uniquement technique ou comptable, elle est aussi psychologique et communicationnelle.

1. Le rôle fondamental de la confiance dans la monnaie

La monnaie, pour remplir ses trois fonctions économiques (unité de compte, intermédiaire des échanges et réserve de valeur), repose sur une convention sociale : tous les acteurs doivent croire que la monnaie sera acceptée demain comme elle l’est aujourd’hui.

Dès que cette confiance se détériore, même temporairement, les agents économiques modifient leurs comportements :

• Les banques deviennent plus prudentes dans la gestion des dépôts et des décaissements.

• Les clients, craignant des blocages ou des refus, limitent les dépôts en espèces.

• Le public recherche d’autres formes de sécurité, comme le stockage de billets ou la thésaurisation, réduisant la monnaie en circulation effective.

Cette attitude rationnelle mais défensive provoque un effet boule de neige : moins de dépôts → moins de ressources pour les banques → tensions accrues sur les retraits → aggravation de la crise de liquidité.

2. Une politique monétaire ne peut réussir sans communication crédible

Même la politique monétaire la plus cohérente peut échouer si elle n’est pas comprise et soutenue par les agents économiques. La Banque Centrale peut injecter des liquidités, baisser les taux directeurs, ou ajuster les réserves obligatoires, mais si les acteurs du marché ne sont pas rassurés, ces instruments perdent leur efficacité.

En Guinée, les réformes monétaires récentes (émission de nouveaux billets, numérisation accrue, modernisation des infrastructures) doivent s’accompagner d’un effort de pédagogie économique, notamment auprès des banques commerciales, des commerçants et du grand public. Faute de cela, l’incertitude prend le dessus, et même les mesures techniques positives sont perçues avec méfiance.

3. La gestion psychologique de la monnaie : un facteur trop souvent négligé

La gestion psychologique d’une monnaie repose sur :

• La clarté des messages de l’autorité monétaire (BCRG),

• La cohérence entre les décisions et leur exécution sur le terrain,

• Et la rapidité à corriger les rumeurs et malentendus.

Un système bancaire fragile ou mal outillé pour gérer les flux d’espèces ou la traçabilité de certaines séries monétaires peut accroître l’anxiété des usagers et freiner l’utilisation normale de la monnaie. Cela crée une crise auto-entretenue, où la rareté perçue devient réelle par anticipation des comportements de précaution.

4. Recommandations économiques concrètes

Pour faire face au manque de liquidités sans invoquer d’événement ponctuel, les leviers structurels suivants sont essentiels :

• Renforcer la fluidité de la circulation monétaire entre les institutions financières (interconnexion, rééquilibrage entre agences).

• Assurer la régularité et la diversité des approvisionnements en espèces, surtout pour les billets de grande valeur.

• Faire de la communication économique un pilier de l’action de la Banque Centrale en vue de renforcer la transparence auprès du public.

• Accélérer la bancarisation numérique avec des solutions accessibles, tout en maintenant une gestion efficiente de la monnaie physique.

• Instaurer des mécanismes de coordination permanente entre la BCRG et les banques primaires, pour anticiper les tensions.

En conclusion:

La situation actuelle de manque de liquidités dans les banques guinéennes nous rappelle une leçon fondamentale : la stabilité monétaire est aussi une construction collective de confiance. Une politique monétaire, même bien pensée, ne porte ses fruits que si elle est crédible, bien expliquée et soutenue psychologiquement par les acteurs économiques. En ce sens, l’économie est autant une affaire de rationalité que de perception.

Yaya Keita 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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